Baudroie abyssale

Un poisson doté d’un système immunitaire aux capacités insoupçonnées

Les baudroies, un mode de reproduction unique au monde et une capacité immunitaire étonnante

Les abysses océaniques, un monde aux mille mystères 

Vous rêviez de découvrir les mystères qui entourent les fascinants abysses océaniques, en voici un qui était non élucidé depuis sa découverte en 1920, puis finalement expliqué ce 30 juillet 2020 par des scientifiques Allemands et Américains dans la revue Science. Il s’agit d’une énigme centenaire concernant le parasitisme sexuel d’une espèce de Baudroie.

Les baudroies, ou poissons-pêcheur, vivent dans les abysses de l’océan, à environ 1000 mètres de profondeurs, où l’eau avoisine les deux degrés tout au long de l’année. En effet, à ces profondeurs, la lumière ne pénètre jamais et les animaux qui s’y trouvent sont adaptés à la vie dans le noir total. Les baudroies étaient étudiées depuis de nombreuses années à cause de leur mode de reproduction unique en leur genre.

 

Un mode de reproduction unique au monde

Appelé parasitisme sexuel, cette formule est expliquée par la « fusion » du mâle à la femelle et ce jusqu’à leur mort. Ils établissent ainsi une circulation sanguine commune, et le mâle devient totalement dépendant de la femelle pour l’approvisionnement en nutriments, comparable à un fœtus dans le ventre de sa mère. Cette étonnante fusion permet le succès de la reproduction entre les mâles et les femelles qui, vivants dans les fonds marins, se rencontrent que très rarement. Mais surtout, elle forme une jonction anatomique inconnue ailleurs dans la nature (excepté chez les vrais jumeaux identiques génétiquement). Le mystère jusqu’à présent non élucidé, résidait dans le fait que l’union ne faisait pas l’objet d’un rejet par le corps de la femelle, comme c’est souvent le cas lorsqu’un humain reçoit une greffe d’organe par exemple.

Ce sont finalement les chercheurs du Max-Planck Institute d’immunobiologie et d’épigénétique de Fribourg, en Allemagne, et de l’Université de Washington à Seattle, aux USA, qui ont résolu cette énigme vieille d’un siècle.

 

Des mécanismes immunitaires troublants mais porteur d’espoir

Pour comprendre le fonctionnement de ce mode de reproduction, les scientifiques se sont intéressés au complexe majeur d’histocomptabilité ( CMH) de plusieurs espèces de baudroies. Le CMH est le système permettant à l’immunité de reconnaître le soi du non soi, il est unique à chaque individu. Ce CMH est divisé en deux molécules formant le CMH de classe 1 et 2. Pour l’être humain par exemple, six gènes codent la classe 1 et huit gènes codent le CMH de la classe 2. Les baudroies eux, possèdent beaucoup moins de gènes codant le CMH, et leurs lymphocytes (censés éliminer les cellules infectées ou attaquer les corps étrangers) sont aussi largement moins présents. Ainsi, aucun anticorps n’est susceptible d’attaquer le mâle lors de sa fusion, pouvant ensuite ne devenir qu’un avec la femelle, et la fournir en spermatozoïde pour la reproduction.

Et si les anticorps sont en moins grande quantité chez les baudroies, il a été découvert que certaines de ces espèces n’en possèdent même aucun, alors qu’ils sont la deuxième arme la plus puissante du système immunitaire. A titre d’exemple, chez l’homme, une absente d’anticorps entraînerait une immunodéficience qui s’avèrerait mortelle. Les baudroies elles, ont donc la capacité de survivre sans fonctions immunitaires acquises et détiendraient des « mécanismes innés très performants pour se défendre contre les infections » explique un des chercheurs.

Bien que ces espèces n’aient pas encore dévoilées tous leurs secrets, les résultats de cette étude exposent des nouveaux sentiers de recherches possibles pour les patients humains souffrant de troubles immunitaires, un lointain espoir pour les personnes atteintes de ces types de maladies.

Source :

 

Article écrit par Cassandre Vareilles

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