Journée de conférences ComAqua 2024

Nous sommes heureux d’avoir participé et assisté aux conférences de la Journée ComAqua 2024, le 24 septembre à Paris

Lien du programme, ici : https://www.alphavisa.com/intercoms/2024/programme-comaqua.php

La journée ComAqua 2024 s’est tenue au FIAP dans le 14eme arrondissement de Paris. Cette journée a débuté avec les mots d’encouragements de la présidente de l’AFSTAL, madame Menard.

Ensuite, le responsable du bureau de la ComAqua, le Dr. Mannioui a pris la parole et présenté les actualités de la ComAqua. Le Dr. Mannioui a annoncé l’arrivée de prochains webinaires sur des thèmes variés à partir de janvier 2025. Ces webinaires seront au format d’une heure de conférence suivie de 30 minutes de questions et d’échanges avec le public.

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Les concepts clés de la douleur chez les animaux ont été présentés par Mme Pouzet, professeur en neurobiologie. La conférence a abordé les généralités sur le thème de la douleur. Notamment en présentant et définissant le vocabulaire tel que la notion de douleur, de nociception qui sont différents de la souffrance. Les termes d’allodynie et hyperalgésie ont également été définis et explicités. Derrière la définition de la douleur, le professeur Pouzet a présenté les conséquences physiologiques qui apparaissent du fait de la douleur comme les réactions d’évitement en guise de protection individuelle. La douleur provoque aussi des phénomènes de protection de groupe comme des cris d’alerte (vocalisation) ou bien la libération de phéromones. 

Lorsque la douleur devient importante dans l’intensité ou le temps, cela déclenche des pathologies. Si des lésions sont produites sous l’effet de la douleur, un dérèglement de la douleur vient ajouter de l’inflammation à ces lésions. L’inflammation peut déplacer le curseur de la douleur, cas de l’allodynie. Par exemple, après avoir reçu un coup de soleil, une simple pression sur la peau est rendue douloureuse. Les douleur peut être classée selon son type, organique ou non-organique, chronique ou aiguë…).

Ensuite, le système neuronal de transmission de la douleur dans le corps a été présenté. Les cellules sensorielles appelées aussi nocicepteurs sont connectées au système nerveux central (moelle-épinière). Les phénomènes d’influx nerveux ont été décrits avec la notion de seuil dans la stimulation nerveuse. Avec la régulation de la douleurs par les neurotransmetteurs, il est possible d’utiliser des molécules qui agissent sur l’efficacité des synapse. Ces molécules sont utilisées comme stratégies thérapeutiques face à de nombreuses maladies chroniques (ex : sclérose en plaques, cancers…).

Enfin, la détermination du type de douleur perçue chez l’animale a été présentée. Les moyens d’observation de la douleur chez l’animale ont été décrits comme les grilles de score, grilles d’observations comportementales. Puis il a été comparé la réception, prise en charge de la douleur chez différents groupes d’animaux (poisson, céphalopodes, crustacés…) à partir de publications scientifiques.

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Une seconde conférence présentée par M.Chazalviel, ingénieur d’étude à l’université de Caen-Normandie a traité du modèle aquatique, les céphalopodes. Ceci en partant des généralités du groupe d’animaux, présentant les caractéristiques de vie des céphalopodes comme le fait qu’ils ne se reproduisent qu’une fois (la femelle) dans leur vie. M. Chazalviel a présenté l’anatomie et la céphalisation de la seiche Sepia officinalis, modèle sur lequel il travail.

Ensuite, la capacité de l’animale a ressentir la douleur a été présentée. Il y a encore trop peu de publications sur le sujet qui caractérisent la douleur chez ce groupe d’animaux. La présence de nocicepteur est peu prouvée dans la littérature scientifique. Toutefois, la réponse comportementale à la douleur est bien identifiée.

Les précautions à prendre avec ces animaux dans le cadre de projets de recherche ont été présentées. Il s’agit d’animaux intelligents pour lesquels des indicateurs de stress sont observables et simples à identifier tel que la fuite, la nage rapide, la projection d’eau, l’éjection d’encre. Néanmoins, ces mécanismes de défense sont très énergivores et épuisent l’animal. Cela peut avoir comme conséquences, une perte d’appétit, de poids ou une position anormales des bras de l’animal. Ainsi l’équipe de M.Chazalviel a mise au point une grille d’évaluation comportementale.

Les méthodes d’anesthésie (perte de conscience) et d’analgésie (suppression de la douleur) utilisées chez les céphalopodes ont été présentées. La visualisation de l’effet de l’anesthésie sur les céphalopodes est différente de celle pour d’autres animaux. Une seiche qui ne bouge pas, cela ne signifie pas toujours qu’elle est endormie. Un animale endormi peut ressentir la douleur et cela s’observe au réveil. Une seiche pour laquelle l’anesthésie fait effet relâche ses chromatophore (cellules de la peau composées de pigments) et se dépigmente sur tout le corps. Ainsi il est important de prendre certaines précautions lors de la manipulation de ces animaux.

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Une troisième conférence a présenté le modèle Xénope en la personne de Mme Massé, maître de conférence à l’université de Bordeaux en biologie cellulaire et biologie du développement. Elle nous a présenté les généralités du modèle amphibien et plus particulièrement de Xenopus laevis. Cet animal présente plusieurs avantages à être utilisé comme modèle de recherche. Il dispose d’un stock d’ovocytes important qui se renouvelle au cours de la vie de l’animale (femelle), c’est un vertébré comme l’homme. Les Xénopes sont un modèle de recherche peu coûteux par rapport aux mammifères.

Puis Mme Massé a présenté comment percevoir la douleur chez des animaux qui ne s’expriment pas comme les mammifères. Chez les amphibiens, il existe une ligne latérale composée de cellules mécano-sensorielles qui permettent à l’animal de détecter les mouvements d’eau. Des nocicepteurs sont présents et sont bien décrits dans la littérature (thermiques, chimiques et mécaniques) chez ces animaux au stade adulte. Chez la larve de xénope, la ligne latérale n’est pas encore développée et les neurones sont concentrés vers la colonne vertébrale sous le nom de neurones de Rohon-beard. Ces neurones disparaissent plus tard lors du développement de la larve au profit d’autres neurones qui seront le système sensorielle nociceptif. Chez la larve, le stress se manifeste par des mouvements soudains, une mauvaise prise de nourriture, de la desquamation de la peau, excès de mucus. Suite a différentes expériences, il a été mis en évidence chez ce groupe d’animaux, des réflexes aversifs dès les derniers stades larvaires.

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Une présentation du modèle poisson a été réalisée par le Dr. Mannioui, Ingénieur de recherche à Sorbonne Université et responsable de la plateforme aquatique de l’institut de biologie Paris-Seine. Suite à un état de l’art sur ce modèle animal, il est reconnu et décrit la présence de nocicepteurs chez la carpe, le saumon, le poisson rouge, le poisson zèbre entre autres. Les nocicepteurs sont présents partout sur le corps notamment autour de la bouche. Ceci permettant de dire que les poissons ressentent bien la douleur liée aux hameçons. Un état de l’art d’expériences réalisées sur des poissons avec différents venins et produits chimiques montrent le comportement des poissons face à la douleur. Les poissons se frottent contre les parois (évitement, gène…) et leur respiration est accélérée (mouvements des fentes branchiales). Ces symptômes sont diminués en temps et intensité avec l’usage d’analgésique tel que la lidocaïne. Il a été décrit dans la littérature scientifique que les poissons détiennent des neurones de transmission, des fonctions cognitives et d’apprentissage mémoire de la douleur. Il est connu que les poissons ont la capacité d’utiliser des objets comme outils. Le Dr. Mannioui a présenté également comment gérer la douleur, sa prise en considération chez le poisson. Il a présenté entre autre des grilles de score de points limites mis à jour par différents groupes comme celui de la ComAqua.

Durant l’après-midi, le vétérinaire de l’entreprise Vétofish, M. Legay a présenté une conférence sur la gestion de la douleur chez les animaux aquatiques. Ceci en commençant par des généralités sur la douleur. La douleur est influencée par le sexe, l’espèce d’animaux, les antécédents de vie mais aussi les paramètre physico-chimiques (température de l’eau, salinité…). L’orateur a insisté sur l’importance de l’utilisation d’analgésie sur des douleurs momentanées c’est-à-dire aiguë. Alors que pour lutter contre des douleurs chroniques, l’usage d’analgésie n’est pas suffisant. Il est recommandé d’intervenir sur l’environnement du poisson entre autres actions.

Pour entrer plus en détails sur la présentation des analgésiques, il en existe de plusieurs sortes :

  • – Les opioïdes (morphine, fentanyl, buprénorphine…)
  • – Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (Kétoprofène, carprofène,…)
  • – Les analgésiques locaux (Lidocaïne…)
  • – Les analgésiques généraux (Tricaïne)

Certains analgésiques (carprofènes) sont à utiliser sur des poissons de grosse taille (truite, carpe) et d’autres (Lidocaïne) sur des poissons de petites tailles (Poisson-zèbre, poisson-clown) a des doses bien précises pour ne pas tuer les poissons par overdose.

Quelques voies d’administration d’analgésique ont été présentées :

  • La Balnéation qui est très utilisée sur des petits poissons ( Poisson-zèbre). Cette technique doit être utilisée en préopératoire, ceci avant de réaliser un bain anesthésique. La durée de la balnéation peut aller jusqu’à 6h (minimum 90 minutes sont recommandées). Ceci pour une durée d’effet de quelques heures. Cela est important de le coupler à de l’anesthésie avant chirurgie pour une meilleure prise en charge de la douleur avant et après l’opération chirurgicale. La balnéation peut se répéter si nécessaire.
  • L’injection est utilisée sur des gros poissons (>10cm). Cette technique est utile pour la réalisation de pit-tag.
  • L’application par voie orale, cette technique rend difficile le calcul des doses absorbées par le poisson. Il y a peu de données collectées sur cette technique et elle pose des problèmes d’appétence. Un gavage est possible mais très expérimental.
  • L’application cutanée, cette technique s’emploie notamment avec du gel de lidocaïne mais nous disposons de peu de données sur l’efficacité de cette technique.

Le vétérinaire a ensuite présenté des exemples de précautions à prendre selon les chirurgies réalisées (Finclip, …). L’enrichissement permet de minimiser l’anxiété et le stress. Il est recommandé de ne pas sortir l’animal de l’eau ou le moins possible, ceci ne doit jamais être fait à main nue mais avec des gants en nitrile. Il est recommandé d’éviter les épuisettes (frottement, desquamation de la peau…), de renouveler le matériel utilisé (aiguille, scalpel…).

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Ensuite, il a été présenté les méthodes d’euthanasie chez les espèces aquatiques par M. Legay. Lorsque les poissons doivent être sacrifiés, cela doit être fait selon une méthode humanitaire, ceci en permettant une mort imminente ou de rendre rapidement le poisson insensible à toute forme de douleur. Cette méthode doit suivre certains critères : ne pas provoquer de signe de panique chez l’animal, que cela provoque la perte de connaissance de l’animal de manière sûre et reproductible. Il faut que la méthode soit sûre et sans danger pour le personnel opérant, que la méthode provoque un minimum d’effet psychologique et physiologique sur l’animal, doit être conforme aux exigences et aux buts de l’étude…. Les méthodes sont autorisées sur décret d’application et changent selon les groupes d’animaux. Les techniques pour les poissons sont différentes de celles autorisées pour les amphibiens et encore différentes de celles pour les céphalopodes pour lesquelles la réglementation est très récente. Souvent, une seconde méthode est à utiliser pour assurer le décès de l’animal.

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Ensuite, Mme Bonnefont, ingénieure de recherche responsable d’un plateau d’exploration fonctionnelle sensorielle et motrice chez le rongeur a présenté le fonctionnement d’un comité d’éthique et son implication sur l’évaluation des demandes d’autorisation de projet (DAP). Les comités d’éthiques sont des autorités compétentes du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ils donnent des avis et évaluations sur des projets en vue de délivrer des autorisations sur les projets scientifiques. Le comité réalise des audits d’agrément annuel avec évaluation sur les moyens humains, financiers… L’évaluation éthique des projets s’effectue avec la balance des dommages/avantages, s’il y a bien absence de méthode alternative, une bonne adéquation entre les modèles animaux utilisés et les objectifs scientifiques du projet. Ces comités d’éthiques doivent inclure 5 personnes minimum, dont un concepteur, un praticien, un zootechnicien, un vétérinaire et une personne non spécialiste du domaine étudié. Il s’agit d’une activité bénévole et chronophage. Il est important que le groupe inclue la pluridisciplinarité, la confidentialité, l’indépendance et l’impartialité dans son fonctionnement. Il s’agit d’une position exposée avec l’usage de données cryptées, ciblée par des associations anti-vivisection.

Il a été décrit la procédure de Demande d’Autorisation de Projet (DAP), la présentation du circuit d’évaluation d’une DAP. Ceci suivi par la présentation de généralités sur le comité d’éthique du languedoc-roussillon (CEEA 36). Il s’agit d’un des plus grands CEEA de France. Il est composé d’une quarantaine de personnes, majoritairement des concepteurs et praticiens. Ce comité se concentre principalement sur des projets rongeurs et minoritairement sur des projets de modèles aquatiques. Ces projets couvrent jusqu’à 8 espèces aquatiques différentes dont des espèces de faune sauvage.

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M. Bedu, Ingénieur de l’animalerie de l’institut Pasteur de Paris a présenté le fonctionnement d’une structures en charge du bien-être des animaux (SBEA). Il a présenté l’animalerie de l’institut Pasteur, hébergeant jusqu’à 3 espèces de poissons, Zebrafish, Truite  et Killifish. Il a ensuite présenté la SBEA au sein de l’institut Pasteur qui a réalisé l’élaboration de processus et une veille réglementaire (actions et réflexions pour établir des recommandations et des outils pour une meilleure gestion des DAP, de la règle des 3R) pour maximiser le bien-être animale. Au sein de l’institut Pasteur, une équipe de biostatisticiens réalise des recommandations sur les protocoles. Il a été conçu une grille de points limites avec prise en compte de la grille de points limites proposée par la ComAqua. La structure accompagne le développement de projets de recherche et participe à la création de fiches techniques de procédure pour le fin clip, pour des méthodes de raffinement… mais aussi réalise des formations sur différents sujets en lien avec les animaux aquatiques de laboratoires à destination des équipes techniques et de recherche.

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La dernière conférence de cette journée portait sur les demandes d’autorisation de projet (DAP) poissons et présentée par Mme Froc, ingénieure d’étude en comportement animal (modèles aquatiques) à l’INRAE. Elle a présenté les points à suivre lors de la rédaction d’une DAP. A savoir, qu’il est important de décrire la procédure en chronogramme de tout ce que va subir l’animal. L’organisation pour les tests doit être bien détaillée (volume d’eau, isolement,…). Il faut vulgariser les termes utilisés pour le résumé européens qui sera lu par des personnes candides et non spécialistes du projet de recherche. La douleur pour l’animale n’est pas évitable et est attendue, donc il faut présenter tout le raffinement qui sera réalisé pour la réduire au maximum. Il a été rappelé que le poisson n’est pas une méthode de raffinement pour ne pas utiliser le modèle rongeur. Il est important de penser à réduire et réutiliser le plus possible les animaux utilisés. Vous pouvez ajouter de l’enrichissement comme source de raffinement tel que les proies vivantes (rotifères, daphnies). Attention, toutefois que l’enrichissement ne stimule pas l’agressivité ou bien réduise la capacité de cicatrisation des animaux ayant subis une chirurgie.

Il est bien de prévoir à l’habituation de l’animal au dispositif expérimental. Ceci en réalisant une habituation à un isolement provisoire (inférieur à 24h) et avant d’appliquer l’isolement prévu pour le projet de recherche.

Après les expérimentations réalisées, il est recommandé de préparer le replacement des animaux ayant servi au projet de recherche. Il est possible de réutiliser les animaux du groupe contrôle et les replacer en aquarium de particulier ou magasin d’aquarium, système aquacole ou autres projets de recherche. L’association White rabbit est impliquée dans le replacement des animaux de laboratoires comme les poissons zèbres.

L’équipe Planktovie remercie les membres de l’AFSTAL et du bureau de la ComAqua qui ont organisé cette journée InterComs 2024.

 

Crédit image : afstal.com ; pixabay.com

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